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sa charge, fut en très peu de temps chez la reine ce qu’il était chez la duchesse Josiane, l’animal domestique indispensable. Un mot qu’il hasarda un jour le mit tout de suite au fait de la reine ; il sut à quoi s’en tenir sur la bonté de sa majesté. La reine aimait beaucoup son lord stewart, William Cavendish, duc de Devonshire, qui était très imbécile. Ce lord, qui avait tous les grades d’Oxford et ne savait pas l’orthographe, fit un beau matin la bêtise de mourir. Mourir, c’est fort imprudent à la cour, car personne ne se gêne plus pour parler de vous. La reine, Barkilphedro présent, se lamenta, et finit par s’écrier en soupirant : C’est dommage que tant de vertus fussent portées et servies par une si pauvre intelligence !

— Dieu veuille avoir son âne ! murmura Barkilpbedro, à demi-voix et en français.

La reine sourit. Barkilphedro enregistra ce sourire.

Il en conclut : Mordre plaît.

Congé était donné à sa malice.

À partir de ce jour, il fourra sa curiosité partout, sa malignité aussi. On le laissait faire, tant