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PENDANT L’EXIL. — 1866.

Jersey, la petite île, était en avant des grands peuples. Elle étaitlibre, honnête, intelligente, humaine. Il paraît que Jersey, voyant que le monde recule, tient à reculer, elle aussi. Paris a décapité Philippe, Jersey va pendre Bradley. Émulation en sens inverse du progrès.

Jersey affirmait le progrès ; Jersey va affirmer la réaction.

Le 11 août, fête dans l’île. On étranglera un homme. Jersey tient à avoir, comme un roi de Prusse ou un empereur de Russie, son accès de férocité. Ô pauvre petit coin de terre !

Quel démenti à Dieu, qui a tant fait pour ce charmant pays ! Quelle ingratitude envers cette douce, sereine et bienfaisante nature ! Un gibet à Jersey ! Qui est heureux devrait être clément.

J’aime Jersey, je suis navré.

Publiez ma lettre si vous voulez. Tout aujourd’hui s’efforce d’étouffer la lumière. Ne nous lassons pas cependant ; et, si le présent est sourd, jetons dans l’avenir, qui nous entendra, les protestations de la vérité et de l’humanité contre l’horrible nuit.

V. H.