Page:Hugo - Œuvres complètes, Impr. nat., Poésie, tome VI.djvu/231

Cette page n’a pas encore été corrigée

Dors ! nous t’irons chercher ! — Ce jour viendra peut-être !
Car nous t’avons pour dieu sans t’avoir eu pour maître ;
Car notre œil s’est mouillé de ton destin fatal,
Et, sous les trois couleurs comme sous l’oriflamme,
Nous ne nous pendons pas à cette corde infâme
                     Qui t’arrache à ton piédestal.


Oh ! va, nous te ferons de belles funérailles !
Nous aurons bien aussi peut-être nos batailles,
Nous en ombragerons ton cercueil respecté.
Nous y convierons tout, Europe, Afrique, Asie,
Et nous t’amènerons la jeune poésie
                     Chantant la jeune liberté.

Ode à la Colonne, Octobre 1830.


I.

 
Après la dernière bataille,
Quand, formidables et béants,
Six cents canons sous la mitraille
Eurent écrasé les géants ;
Dans ces jours où caisson qui roule,
Blessés, chevaux, fuyaient en foule,
Où l’on vit choir l’aigle indompté,
Et, dans le bruit et la fumée,
Sous l’écroulement d’une armée,
Plier Paris épouvanté ;

Quand la vieille garde fut morte,
Trahi des uns, de tous quitté,
Le grand empereur, sans escorte
Rentra dans la grande cité.
Dans l’ancien palais Elysée
Il s’arrêta, l’âme épuisée ;