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82 ÉLÈVES DE SOMIS. — GIARDINI EN ANGLETERRE.

qu’il se rendit à Rome dans l'espoir de s’y placer avantageusement ; n’ayant pu y réussir, il alla à Naples et y entra à l’orchestre du théâtre. Il aimait beaucoup à charger de broderies et de fioritures la musique qu’il exécutait, même dans les parties d’accompagnement ; le public goûtait cette nouveauté et l’applaudissait chaque soir. Cette manie lui valut une rude leçon qui dût le corriger. On jouait un opéra de Jomelli ; ce maître vint s’asseoir dans l'orchestre et se plaça près de Giardini. Celui-ci, comptant sur les éloges du compositeur, redouble d’efforts pour imaginer des traits nouveaux dont il ornait à profusion sa partie ; mais tout-à-coup il fut interrompu au milieu de cet agréable exercice par un soufllet qu’il reçut de la main de Jomelli. En 1744, il se rendit à Londres, et son arrivée en cette ville produisit une vive sensation parmi les amateurs. On n’y connaissait que la manière un peu surannée de Festing et de Brown, et le style grave de Geminiani ; le jeu agréable et plus moderne de Giardini fit oublier ces vieux artistes. On le regarde comme le fondateur de l'Ecole de violon en Angleterre[1].

  1. L’école de violon a toujours été faible parmi les Anglais. Vers 1710, Geminiani fit connaître à Londres les ouvrages de Corelli et les mit à la mode par le talent qu’il déployait dans leur exécution. Lui-même écrivait pour le violon, et ses concertos sont encore classiques, dans les concerts, comme ceux de Corelli, son maître. Londres est même la seule ville de l’Europe où l’on entend encore en public de la musique de Corelli et de Geminiani. Veracini arriva en Angleterre en 1714 ; c’était aussi un violoniste habile, dont la musique était excellente ; mais les anglais lui préférèrent toujours Geminiani. Matthews Dubourg fut le premier violoniste anglais de quelque mérite ; il brillait dans le même temps que Haendel. Nous avons du reste parlé de ce violoniste dans la première partie de cet ouvrage. Cramer, père du pianiste de ce nom, introduisit à Londres en 1770, la manière allemande de l’école de Benda, manière agréable, mais qui manque de force et de son. François Cramer, son fils, conserva la tradition de cette manière, qui parait toujours bien faible. En 1744, Giardini vint en Angleterre fonder une école, et fut