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INSTRUMENTS COMPOSANT LA MUSIQIE D’ENSEMBLE. 15

récitative, il faut l’avoir entendue sur les lieux pour bien juger de son mèrite[1].

«Quant à la musique instrumentale, elle était composée d’un orgue, d’un grand clavessin, d’une lyre, de deux ou trois violons et de deux ou trois archiluths. Tantost un violon sonnait seul avec l’orgue, et puis un autre respondait : une autre fois ils touchaient tous trois ensenible différentes parties, et puis tous les instruments reprenaient ensemble. Tantost un archiluth faisait mille variétez sur dix ou douze notes, chaque note de cinq ou six mesures : puis l’autre touchait la même chose quoyque différemment. 11 me souvient qu’un violon sonna de la pure chromatique : et bien que d’abord cela me sembla fort rude à l’oreille, néanmoins je m’accoutumay peu à peu à cette nouvelle manière, et y pris un extrême plaisir. Mais surtout ce grand Frescobaldi fit paroistre mille sortes d’inventions sur son clavessin, l’orgue tenant toujours ferme[2].

  1. II s’agit ici des oratorios, espèces de drames dont le sujet était pris dans la Bible et qui dérivaient évidemment des Mystères. On dit que c’est saint Philippe de Néri, fondateur de la Congrégation de l’Oratoire, qui, le premier, en 1548, en introduisit l’usage dans les églises pendant les jours de carnaval. L’oratorio, Anima e corpo d’Emile del Cavalière, représenté à Rome en 1600, est le premier drame religieux où le dialogue se trouve en forme de récitatif.
    J.-J. Rousseau, au mot Oratorio de son Dictionnaire de musique, saisit l’occasion de lancer une épigramme contre la musique française : Cet usage, dit-il, assez commun en Italie, n’est point admis en France ; la musique française est si peu propre au genre dramatique que c’est bien assez qu’elle y montre son insuffisance au théâtre sans l’y montrer encore à l’église."
  2. Frescobaldi, le plus savant et le plus célèbre des organistes de son temps, naquit à Ferrare vers 1588 et mourut vraisemblablement entre les années 1655 et 1660. Pietro Délia Valle appelle Frescobaldi un Hercule ! dans son Discorso délia musica dell’eta nostra, publié dans le deuxième volume De Trattati de musica, de J.-B. Doni. 1763, in-fol.