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l'abri de la pluie et du mauvais temps. Ces petites élévations d’herbes sèches et brûlées par le soleil, ont la forme et la grosseur des monticules de terre mobile soulevés par les taupes. L’endroit où nous avions dressé la tente était fréquenté par un grand nombre d’écureuils gris. La soif nous rendit cruels, et nous nous mîmes à dégrader la demeure de ces pauvres petites bêtes, qui couraient se sauver dans leur trou à mesure que nous approchions pour nous emparer de leur toit. A force de vandalisme, nous fîmes un fagot assez gros pour pouvoir chauffer l’eau du puits, qui fut notre seul aliment pendant cette journée.

Quoique l’impossibilité de faire du feu nous forçât parfois à des économies, nos provisions diminuaient pourtant. Il nous restait fort peu de farine et de petit millet grillé. Un cavalier tartare, dont nous fîmes la rencontre, nous avertit que nous étions à peu de distance d’une station de commerce, nommée Chaborté (Bourbier). Cet endroit nous détournait de la route que nous suivions : mais nous ne pouvions nous approvisionner ailleurs, avant d’arriver à la Ville Bleue, dont nous étions encore éloignés d’une centaine de lieues. Nous marchâmes donc un peu obliquement sur la gauche, et nous arrivâmes à Chaborté.