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pas de temps à perdre, si nous voulons faire quelque profit. La saison de la pêche est très-courte, elle dure tout au plus trois mois ; encore quelques jours, et nous serons obligés de nous retirer dans les terres cultivées. Le Paga-Gol sera glacé, il n'y aura plus moyen de prendre aucun poisson. Vous voyez, Seigneurs Lamas, que nous n'avons pas de temps à perdre. J'ai passé toute la nuit à donner la chasse aux poissons ; quand j'aurai bu le thé et mangé quelques écuellées de farine d'avoine, je remonterai sur ma nacelle, et j'irai lever mes filets que j'ai jetés vers l'ouest ; ensuite je mettrai les poissons pris dans ces réservoirs d'osier que vous voyez flotter là-bas, je ferai la visite des filets, je raccommoderai les mailles peu solides, et après avoir pris un peu de repos, au moment où le vieux-aïeul (le soleil) se cachera, j'irai de nouveau jeter mes filets ; puis je parcourrai le bassin, tantôt d'un côté, tantôt d'un autre, sans cesse occupé à frapper le tambour de bois avec mes deux baguettes ... Ces détails nous intéressèrent : et comme nos occupations du moment n'étaient pas très-urgentes, nous demandâmes au pêcheur s'il nous serait permis de l'accompagner quand il irait lever ses filets. — Puisque des personnages comme vous, nous répondit-il, ne dédaignent pas de monter sur ma vile nacelle, et d'assister à ma pêche maladroite et désagréable à voir, j'accepte le bienfait que vous me proposez ...

Nous nous assîmes donc à côté de son rustique foyer, pour attendre qu'il eût pris son repas. Le festin du pêcheur fut aussi court que les préparatifs en avaient été brefs. Quand le thé eut suffisamment bouilli, il en puisa une écuellée, plongea dedans une poignée de farine d'avoine,