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une petite corde lâchement tressée avec des fils de coton. Quand cette espèce de cordon sanitaire est desséché, on n'a qu'à le suspendre à son cou ; les poux se gonflent, prennent une teinte rougeâtre, et meurent à l'instant. En Chine comme en Tartarie, il est nécessaire de renouveler ce cordon à peu près tous les mois ; car dans ces sales pays il serait autrement très-difficile de se préserver de la vermine. On ne peut s'asseoir un instant dans une maison chinoise ou dans une tente mongole, sans emporter dans ses habits un grand nombre de ces dégoûtants insectes.

Les Tartares n'ignorent pas ce moyen efficace et peu coûteux de se préserver des poux, mais ils n'ont garde d'en user. Accoutumés dès leur enfance à vivre au milieu de la vermine, ils finissent par n'y presque plus faire aucune attention ; seulement, quand ces hôtes importuns se sont multipliés au point d'attaquer leur peau d'une manière trop sensible, ils songent au moyen d'en diminuer un peu le nombre. Après s'être dépouillés de leurs habits, ils font en commun la chasse de ce menu gibier ; cette occupation est pour eux un délassement et comme une honnête et aimable récréation. Les étrangers ou les amis qui se trouvent alors dans la tente, s'emparent sans répugnance d'un pan de l'habit, et aident de leur mieux à cette visite domiciliaire. Les Lamas qui se trouvent de la partie, se gardent bien d'imiter l'impitoyable barbarie des hommes noirs, et de tuer les poux à mesure qu'ils les saisissent ; ils se contentent de les lancer au loin, sans leur faire le moindre mal ; car, d'après la doctrine de la métempsycose, tuer un être vivant quelconque, c'est se rendre coupable d'homicide. Quoique l'opinion générale soit ainsi, nous avons rencontré