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aperçûmes qu'Arsalan ne suivait plus la caravane. Nous fîmes une halte, et Samdadchiemba monté sur son petit mulet noir rebroussa chemin pour aller à la découverte. Il parcourut tous les villages que nous avions rencontrés sur notre route ; mais ses recherches furent inutiles, il revint sans avoir trouvé Arsalan. — Ce chien était chinois, dit Samdadchiemba, il n'était pas accoutumé à la vie nomade ; il se sera fatigué de courir le désert, et aura pris du service dans les terres cultivées... Que faut-il faire ? faut-il attendre encore  ? — Non, partons ; il est déjà tard, et il y a encore loin d'ici à l' Enceinte-Blanche. — S'il n'y a pas de chien, hé bien, soit ; qu'il n'y ait pas de chien ; est-ce que nous ne pourrons pas faire route sans lui ? Après ces paroles sentimentales de Samdadchiemba, nous nous remîmes en route.

Tout d'abord la perte d'Arsalan nous contrista un peu ; nous étions accoutumés à le voir aller et venir dans les prairies, se jouer à travers les grandes herbes, courir après les écureuils gris, et donner l'épouvante aux aigles qui se posaient dans la plaine. Ses évolutions continuelles servaient à rompre la monotonie des pays que nous parcourions, et abrégeaient en quelque sorte la longueur de la route. Sa fonction de portier était surtout un titre à nos regrets. Cependant, après que nos premiers mouvements de sensibilité furent passés, une mûre réflexion vint nous faire comprendre que cette perte n'était pas tout-à-fait aussi grande que nous l'avions d'abord imaginé. A mesure que nous avions fait des progrès dans la vie nomade, notre appréhension des voleurs s'était diminuée. Arsalan d'ailleurs faisait assez mal son office de gardien ; des marches