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traduction des livres classiques et historiques, et de la rédaction de plusieurs dictionnaires. Pour exprimer des objets nouveaux et une foule de conceptions, qui jusqu'alors avaient été inconnus des Mantchous, il fallut inventer des expressions empruntées pour la plupart des Chinois, mais que l'on cherchait à accommoder par de légères altérations au génie de l'idiome tartare. Ce procédé tendant à faire disparaître insensiblement l'originalité de la langue mantchoue, l'empereur Kien-Loung y remédia, il fit rédiger un dictionnaire dont tous les mots chinois furent bannis. On interrogea les vieillards et les savants les plus versés dans leur langue maternelle ; et des récompenses furent proposées à quiconque découvrirait une ancienne expression hors d'usage, et digne d'être consignée dans cet important ouvrage.

Grâce à la sollicitude et au zèle éclairé des premiers souverains de la dynastie actuelle, il n'est maintenant aucun bon livre chinois qui n'ait été traduit en mantchou. Toutes ces traductions jouissent de la plus grande authenticité possible, puisqu'elles ont été faites par de savantes académies, par ordre et sous les auspices de plusieurs empereurs, et que de plus elles ont été ensuite revues et corrigées par d'autres académies non moins instruites, dont les membres savaient parfaitement la langue chinoise et l'idiome mantchou.

La langue mantchoue a reçu, par ces travaux consciencieux, un fondement solide ; on pourra bien ne plus la parler ; mais elle demeurera toujours comme langue savante, et sera d'un puissant secours pour les philologues qui voudront faire des progrès dans les études asiatiques. Outre les