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et bordent les chemins. Les autres pays tartares, cultivés par les Chinois, n'ont jamais un aspect semblable ; les arbres ne peuvent y vieillir ; on n'essaie pas même d'en planter, car on est assuré qu'ils seraient arrachés le lendemain, par des malheureux qui s'en feraient du bois de chauffage.

Nous avions fait trois journées de marche dans les terres cultivées du Toumet, lorsque nous entrâmes dans Kou-Kou-Hote (Ville-Bleue), appelée en chinois Koui-Hoa-Tchen. Il y a deux villes du même nom, à cinq lis de distance l'une de l'autre. On les distingue en les nommant l'une Ville vieille, et l'autre Ville neuve, ou bien encore Ville commerciale et Ville militaire. Nous entrâmes d'abord dans cette dernière, qui fut bâtie par l'empereur Khang-Hi, pour protéger l'empire contre les ennemis du nord. La ville a un aspect beau, grandiose, et qui serait même admiré en Europe. Nous entendons seulement parler de son enceinte de murailles crénelées, construites en briques ; car, au dedans, les maisons basses, et en style chinois ne sont nullement en rapport avec les hauts et larges remparts qui les entourent ; l'intérieur de la ville n'a de remarquable que sa régularité et une grande et belle rue qui la perce d'orient en occident. Un Kiang-Kiun ou commandant de division militaire, y fait sa résidence avec dix mille soldats, qui tous les jours sont obligés de faire l'exercice. Ainsi cette ville peut être considérée comme une grande caserne.

Les soldats de la ville neuve de Koukou-Hote sont Tartares-Mantchous ; mais si par avance on ne le savait pas, on ne le soupçonnerait guère en les entendant parler. Parmi eux, il n'en existe peut-être pas un seul qui soit capable de comprendre la langue de son pays. Déjà deux