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d'un nuage de poussière, comme une grande troupe qu1 s'avançait avec la rapidité du vent. Nous pûmes bientôt distinguer les huit cavaliers, et nos deux animaux qu'on traînait par le licou ; tout venait ventre à terre. Aussitôt que les Tartares furent arrivés près de nous, ils nous dirent, avec cet air de satisfaction qui succède à une grande inquiétude, que dans leur pays on ne perdait jamais rien. Nous remerciâmes ces généreux Mongols du service signalé qu'ils venaient de nous rendre ; nous vantâmes leur habileté, et après avoir pris congé d'eux, nous allâmes seller nos fuyards et nous partîmes. Nous nous dirigeâmes vers la route de la Ville-Bleue que nous avions laissée un peu de côté pour aller nous approvisionner à Chaborté.

Nous avions fait à peu près trois jours de marche, lorsque nous rencontrâmes dans le désert une imposante et majestueuse antiquité. C'était une grande ville déserte et abandonnée. Les remparts crénelés, les tours d'observation, les quatre grandes portes situées aux quatre points cardinaux, tout était parfaitement conservé ; mais tout était comme aux trois quarts enfoui dans la terre, et recouvert d'un épais gazon. Depuis que cette ville avait été abandonnée, le sol s'étant insensiblement élevé avait presque fini par atteindre la hauteur des créneaux. Quand nous fûmes arrivés vis-à-vis la porte méridionale, nous dîmes à Samdadchiemba de continuer la route, pendant que nous irions visiter la Vieille-Ville, comme la nomment les Tartares. Nous entrâmes dans cette vaste enceinte avec un profond saisissement de frayeur et de tristesse. On ne voit là ni décombres ni ruines, mais seulement la forme d'une belle et grande ville qui s'est enterrée à moitié, et que les