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on l'exerce à aller à cheval : on le fait monter en croupe, puis on commence une course au galop, pendant laquelle le jeune cavalier se cramponne de ses deux mains à la robe de son maître. Les Tartares s'accoutument ainsi de bonne heure au mouvement du cheval ; et bientôt, à force d'habitude, ils finissent par s'identifier, en quelque sorte, avec leur monture.

Il n'est peut-être pas de spectacle plus attrayant, que de voir les cavaliers mongols courir après un cheval indompté. Ils sont armés d'une longue et lourde perche, au bout de laquelle est une corde disposée en nœud coulant ; ils se précipitent, ils volent sur les traces du cheval qu'ils poursuivent, tantôt dans des ravins scabreux et pleins d'anfractuosités, tantôt sur le penchant des montagnes ; ils le suivent dans les détours les plus capricieux, jusqu'à ce qu'ils soient parvenus à le talonner. Alors ils prennent la bride avec leurs dents, saisissent à deux mains leur lourde perche, et se penchent en avant pour faire passer le nœud coulant autour du cou du cheval. Dans cet exercice, ils doivent joindre une grande vigueur à beaucoup d'adresse, pour arrêter tout net le cheval le plus fougueux. Il arrive quelquefois que la perche, les cordes, tout est brisé ; mais que le cavalier soit désarçonné, c'est ce que nous n'avons jamais vu.

Le Mongol est tellement accoutumé à aller à cheval, qu'il se trouve tout-à-fait désorienté et comme jeté hors de sa sphère, aussitôt qu'il a mis pied à terre. Sa démarche est pesante et lourde ; la forme arquée de ses jambes, son buste toujours penché en avant, ses regards qu'il promène incessamment autour de lui, tout annonce un cavalier, un