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BETSIAMIS

de croix, etc., et tout cela sans laisser nulle part un sou de dette.

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À part le temps des voyages dont j’ai parlé, les Pères restent à Betsiamis, la seule résidence qu’ils possèdent sur la Côte Nord. Durant la plus grande partie de l’année, la bourgade est peu peuplée : environ soixante-quinze sauvages, vieillards, veuves, enfants, ou malades qui n’ont pu suivre les autres à l’intérieur des terres. Mais, l’été, durant les mois de juillet et d’août, c’est l’époque où le village est au complet. On y compte alors jusqu’à 120 familles.

Les uns habitent de petites maisons ; les autres vivent sous la tente. Maisons de bois ou de toile sont échelonnées au fond de la baie de Betsiamis ou le long de l’estuaire de la rivière du même nom, sur la rive de l’est.

Cette rivière Betsiamis, longue d’environ 260 milles, n’a guère qu’un arpent et quart de largeur à son embouchure ; cette largeur devient ensuite de trois ou quatre arpents sur un certain parcours. Elle est navigable jusqu’à une quinzaine de lieues du fleuve, et le petit vapeur appartenant à la St. Lawrence Lumber Co. la remontait jusqu’à cette distance, où il était arrêté par les rapides. Dans ses eaux, on trouve le brochet, la truite, et surtout le saumon. Pour ce qui est du saumon, il y était autrefois très abondant. Le flottage des bois de commerce, que l’on faisait descendre aux scieries de Bersimis, l’en a un peu chassé. Du reste, la rivière Betsiamis n’a jamais été exploitée pour la pêche au saumon, comme bien d’autres rivières ; les rapides y rendaient difficile la pêche à la mouche. Et, d’ailleurs, le gouvernement a donné cette rivière aux sauvages ; elle est leur propriété exclusive, et les sportsmen peuvent en faire leur deuil. Il est même probable que c’est le seul exemple d’une rivière appartenant de la sorte aux indigènes. Ce cours d’eau est la route qu’ils fréquentent davantage soit pour venir