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NATASHQUAN

davantage : c’était celle des droits de propriété sur les emplacements qu’ils occupaient. « En arrivant dans ce lieu, il y a deux ans, écrivait l’abbé Ferland en 1858, les colons se placèrent près du rivage, et après avoir mesuré l’étendue de grève que chacun se réservait, ils se mirent à l’œuvre, pour construire des habitations avant la venue de l’hiver. Chaque lopin a environ quatre-vingts ou cent pas de largeur sur une profondeur indéterminée ; avec la pêche, il suffirait pour faire vivre convenablement une famille laborieuse. » L’écrivain fait ensuite valoir les considérations qui devraient engager le gouvernement canadien à régulariser la position de ces colons qui ont trouvé tout simple de s’établir, sans demander de permission à personne, sur une côte absolument sauvage et déserte : ces pauvres Acadiens ignoraient, à coup sûr, qu’il y avait une seigneurie de Mingan, et que les seigneurs de Mingan avaient ou prétendaient avoir la propriété de ce territoire. Et puis, où les trouver, ces seigneurs de Mingan ! Voilà bien ce qui s’est passé à l’établissement de tous les postes de la Côte Nord : chacun s’est fixé où il a voulu, et s’est taillé un domaine à sa guise, — comme ont fait les nations de l’Europe dans les quatre autres parties du monde, souvent avec beaucoup moins de bonne foi que nos Labradoriens.

En tout cas, pour ce qui concerne Natashquan, cette question de propriété n’existe plus, depuis que les limites orientales de la seigneurie de Mingan ont été fixées à Goynish par l’autorité judiciaire. Les Natashquanais conservent, donc en parfaite sécurité les terrains qu’ils ont choisis à titre de premiers occupants.

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Le bonheur des gens de Natashquan n’est pourtant pas parfait : ils ne reçoivent la poste qu’une fois par mois ! Il est vrai que cela les met à l’abri, en bonne mesure, de l’influence des journaux ; et l’avantage n’est pas léger. Car il faut l’avouer, en notre pays même, la presse est trop souvent ou