Page:Huard - Labrador et Anticosti, 1897.djvu/392

Cette page a été validée par deux contributeurs.
374
LABRADOR ET ANTICOSTI

Chacun des chefs de famille recevait du gouvernement un domaine de cent acres, aux conditions ordinaires, excepté que les colons pouvaient ne commencer à payer leur concession de terre que deux années après la prise de possession.

Et le curé de Saint-Côme, M. l’abbé Boutin, bien que résidant à onze milles de la nouvelle colonie, se fit un devoir d’aller passer deux jours de chaque semaine au milieu de ses anciens paroissiens de Natashquan, pour les encourager et les diriger.

Tout l’automne et tout l’hiver de la première année, les colons vécurent aux frais du gouvernement provincial, qui avait alloué une somme de six mille piastres en faveur de l’entreprise, et qui fournit encore des grains de semence au printemps suivant. Le 31 mars, le premier ministre avait demandé à la Législature de Québec un nouveau secours de mille piastres. À la session suivante, en 1888, nouveau débat à la Chambre, sur la proposition de venir encore en aide à ceux que l’on nommait toujours « les colons du Labrador ». Et chaque fois qu’il était question de favoriser cette intéressante colonie, on « cessait les luttes fratricides » ; la farouche opposition oubliait sa férocité native, et l’on jouissait, durant une heure, des charmes de l’union — qui fait la force au Canada comme en Belgique.

Quel a été le succès de cette colonie acadienne dans la Beauce ?

Quelques colons perdirent courage « quand ils virent, me disait un vieil Acadien de Natashquan, ces grands arbres, dont le faîte était si loin, et qu’il fallait abattre ». En effet, la forêt de la Beauce ne ressemble pas beaucoup à celle de la Côte Nord, et il y avait de quoi effrayer des gens qui, après tout, n’avaient été, toute leur vie, que des… pêcheurs à la ligne. Toutefois, la plupart ont persévéré, et d’autres familles du Labrador sont venues les rejoindre. Aujourd’hui, cette colonie acadienne comprend environ soixante-cinq familles, et forme la paroisse de Saint-Théophile. À Saint-Zacharie de Metgermette, il reste quatre familles des cinq qui s’y étaient établies.