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LE MANOIR

quatre fois presque jusqu’au sang pour me réveiller, tant je dormais encore profondément à sept heures du matin.

Tant mieux, pensa l’aubergiste, il est de meilleure humeur qu’en se couchant.

— Et tenez-vous toujours à votre gageure ? ajouta DuPlessis.

— Mais sans doute ; je tiens toujours à tout ce que je peux, et à ma parole avant tout, va sans dire. Allons, mon brave oncle, servez-nous quelque chose à manger, nous l’arroserons de votre vin des Canaries, qui, décidément, se laisse bien boire, puis nous irons présenter nos hommages ou autre chose s’il le préfère, à maître Thom Cambrai, avec monsieur, s’il est toujours dans les mêmes intentions.

Après s’être lesté d’un solide déjeuner, Michel partit en compagnie de DuPlessis. Le jardin ou le parc, comme on voudra l’appeler, du manoir, entouré d’une haute palissade, avait un aspect sombre et triste. On y entrait par une porte en frêne, garnie de clous à grosses têtes.

— Il ne serait pas facile de prendre la place d’assaut, observa Michel en examinant la porte ; mais, ajouta-t-il en s’approchant, elle n’est pas fermée et elle nous invite à entrer.

Ils pénétrèrent dans une avenue de gros arbres, bordée par une haie de houx et d’ifs qui, n’ayant pas été taillés depuis plusieurs années, formaient de grands buissons noirs. L’herbe croissait dans l’avenue, qui était traversée par d’autres allées également obstruées par des mauvaises herbes et des broussailles.

— Ce bocage est noir comme la gueule d’un loup ! dit Michel en s’avançant dans cette avenue serpentante, au bout de laquelle nos deux aventureux visiteurs commençaient à apercevoir la façade du manoir, avec ses fenêtres cintrées, ses murs couverts de lierre et ses hautes cheminées de pierre.