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Ulysse est devant moi, tous deux, sans raisonner,
Nous nous reconnaîtrons ; car il est plus d’un signe
Entre nous convenu, des autres ignoré. »

Elle dit, et le preux eut un sourire digne ;
Puis dardant à son fils ce langage assuré :
« Télémaque, permets que ta mère m’éprouve
En cet endroit ; bientôt on me connaîtra mieux,
Parce que je suis sale et couvert d’habits vieux,
Ce n’est plus — triste affront ! — Ulysse qu’on retrouve.
Réfléchissons pourtant au meilleur des moyens.
Quand quelqu’un chez un peuple a tué son semblable.
N’eût-il à redouter de vengeur implacable,
Il fuit, laissant son toit et ses concitoyens.
Nous, nous avons détruit les colonnes d’Ithaque,
J’entends ses plus beaux fils : que faire dans ce cas ? »

À cette question, le prudent Télémaque :
« Bon père, tire-nous toi-même d’embarras.
Ta sagesse, dit-on, n’a point d’égale au monde ;
Aucun mortel sur toi ne saurait l’emporter.
Marche, nous te suivons, et, moi, je te seconde,
Tant qu’il me restera des forces pour lutter. »

En retour le héros aux multiples mesures :
« Bien ! je vous guiderai sans aller à tâtons.
Baignez-vous tout d’abord, prenez de blancs chitons,
Invitez chaque ancelle à mettre ses parures ;
Puis, que le divin chantre, ayant sa lyre en main,
Nous incite à former une danse joyeuse,
De façon qu’au dehors l’oreille curieuse
Des voisins, des passants, pense ouïr un hymen,