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Me dit, en étreignant mes deux mains dans les siennes :
« Femme, je ne crois pas que des rives troyennes
Retournent sains et saufs tous les Grecs bien guêtrés.
En effet les Troyens sont des guerriers de taille,
Habiles à pleuvoir flèches et javelots,
À monter des coursiers dont les rudes galops
Décident promptement le gain d’une bataille.
Serai-je donc là-bas par le Sort épargné,
Ou vaincu ? je l’ignore ; ici, toi, veille austère.
Chéris dans le palais et mon père et ma mère,
Comme à cette heure, et plus, moi restant éloigné.
Quand notre fils aura son poil d’adolescence,
Prends un nouvel époux, et quitte ce pourpris. »
Voilà ce qu’il disait ; mon sacrifice avance.
La nuit vient, où je dois, malgré mes longs mépris,
Subir un autre hymen, puisque Zeus m’abandonne.
Mais mon âme est en proie à des soucis mordants :
Jadis l’honnêteté guidait les prétendants.
Lorsque d’une héritière à la fois riche et bonne
Ils recherchaient la main, rivalisant entre eux,
Eux-mêmes amenaient bœufs et brebis par bandes
Pour fêter ses entours, puis la comblaient d’offrandes,
Sans se faire d’autrui les hôtes désastreux. »

Elle dit ; l’humble Ulysse eut la fibre amusée
De ce qu’elle attirait leurs dons, par un discours
Mielleux, tandis qu’ailleurs s’envolait sa pensée.

Le fils d’Eupithe, Antine, apportant son concours :
« Prudente Pénélope, admirable Icaride,
Reçois donc les présents qu’ici déposera
Chaque Grec ; refuser serait chose insipide.