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Ainsi parle Amphinome, et son dire est goûté.
On se lève, on retourne aux demeures d’Ulysse ;
Là, chacun se remet sur son siège sculpté.

Voici qu’au même instant la Reine se décide
À paraître au milieu des Poursuivants hautains.
Elle a su pleinement le projet régicide
Par le héraut Médon qui surprit leurs desseins.
De sa chambre elle sort avec son entourage.
Quand la divine femme approche des félons,
Elle s’arrête au seuil de ses riches salons.
Un voile étincelant recouvre son visage.
Mirant Antinoüs, elle éclate en ces mots :
« Antine, homme effronté, machinateur de crimes,
Dans Ithaque on prétend que sur ceux-ci tu primes
Par le tact, la raison ; menteur est le propos.
Monstre, pourquoi tramer la mort de Télémaque ?
Tu ris des suppliants dont Zeus est le vengeur.
Certe, il est odieux que l’un l’autre on se traque.
Ne sais-tu que ton père, en pâle voyageur,
Vint fuir son peuple ici ? Tous étaient gonflés d’ire,
Parce que, soutenant des bandits taphiens,
Du Thesprote, à nous cher, il ravagea les biens.
Ils voulaient l’accabler, en poudre le réduire,
Ensuite dévorer son vivre exubérant.
Ulysse réprima leur audace jalouse.
Et tu pilles son toit, tu brigues son épouse,
Tu massacres son fils et vas me torturant !
Cesse, je te l’ordonne, et fais cesser les autres. »

Le surgeon de Polybe, Eurymaque, aussitôt :
« Fille d’Icarius, qu’estiment tous les nôtres,