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L’une tend à ravir de fins tapis pourprets
Sur des sièges pompeux, qu’un lin pur couvre encore.
L’autre roule aux fauteuils des trapèzes d’argent
Que de son tour doré maint corbillon décore.
La troisième mélange un vin doux, indulgent,
Dans un luisant cratère et sert d’orins calices.
L’ultime apporte l’eau, puis allume un grand feu
Sous un trépied immense, où cette eau bout dans peu.
Après qu’elle a frémi dans l’urne aux parois lisses,
J’entre dans la baignoire, et la nymphe, puisant
L’onde claire au trépied, me lave tête, épaules,
Jusqu’à ce que ma peau sente un bien suffisant.
Lorsqu’elle m’a baigné, frotté d’essences molles,
La belle orne mon corps d’un chiton, d’un manteau ;
Puis elle m’introduit, m’assied sur un beau trône
Semé de clous d’argent, me glisse un escabeau.
En un bassin d’argyre une ancelle mignonne
Répand, d’un cruchon d’or, l’eau des ablutions,
Et devant moi transporte une table cirée.
De pain, de mets divers l’intendante honorée
La charge en recourant à ses provisions.
Circé veut que je mange, et je boude à l’invite ;
Je reste assis rêveur, n’augurant que des maux.
Me voyant sans bouger, sans qu’aucun plat m’incite,
Uniquement en proie à d’intimes assauts,
Circé approche et me tient ce rapide langage :
« Ulysse, pourquoi donc rester ainsi muet,
Te dévorant le cœur, fuyant mets et breuvage ?
De quelque nouveau dol je te crois inquiet ;
Mais ne crains rien, je fis un serment formidable. »

Elle dit ; ma réponse est de cette façon :