Page:Homère - Odyssée, traduction Séguier, Didot, 1896.djvu/110

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Quand on eut bien vidé l’assiette et le calice,
La belle Calypso, comme péroraison :
« Noble fils de Laërte, industrieux Ulysse,
Dans le plus bref délai vers ton sol, ta maison,
Tu veux donc t’en aller ? Eh bien, soit ! bonne chance.
Si tu savais combien, dans un proche avenir,
T’attendent de malheurs avant d’y parvenir,
Tu ne quitterais pas ma douce demeurance
Et serais immortel, encor que bien tenté
D’embrasser une épouse, objet de tes alarmes.
Moi, de ne lui céder en stature ni charmes
Je me flatte à coup sûr, puisque pour la beauté
Vos femmes ne sauraient primer des immortelles. »

L’ingénieux Ulysse aussitôt répondit :
« Nymphe, ne m’en veux pas ; certes je me suis dit,
Et souvent, qu’en attraits, en grâces personnelles,
La chaste Pénélope est au-dessous de toi.
Elle passe, et tu ris de la mort et de l’âge.
Mais j’entends néanmoins, je désire avec rage
Voir le jour du départ et retourner chez moi.
Si quelque dieu me frappe au milieu du flot sombre,
Je me résignerai ; mon cœur est fait à tout.
J’ai souffert mille maux, j’eus des revers sans nombre
En campagne et sur mer : qu’importe un autre au bout ! »

Il dit ; le soleil chut, l’ombre emplit les collines.
Au fond de la caverne en hâte renfermés,
Dans les bras l’un de l’autre ils restèrent pâmés.

Quand l’Aurore effeuilla ses roses matutines,
Ulysse, en blouse et cape, à s’élancer fut prompt.