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des nouvelles dans Ithakè, et qu’il n’accomplira point son dessein.

Ayant ainsi parlé, il rompit aussitôt l’agora, et ils se dispersèrent, et chacun retourna vers sa demeure. Et les Prétendants se rendirent à la maison du divin Odysseus. Et Tèlémakhos s’éloigna sur le rivage de la mer, et, plongeant ses mains dans la blanche mer, il supplia Athènè :

— Entends-moi, Déesse qui es venue hier dans ma demeure, et qui m’as ordonné d’aller sur une nef, à travers la mer sombre, m’informer de mon père depuis longtemps absent. Et voici que les Akhaiens m’en empêchent, et surtout les orgueilleux Prétendants.

Il parla ainsi en priant, et Athènè parut auprès de lui, semblable à Mentôr par l’aspect et par la voix, et elle lui dit ces paroles ailées :

— Tèlemakhos, tu ne seras ni un lâche, ni un insensé, si l’excellent esprit de ton père est en toi, tel qu’il le possédait pour parler et pour agir, et ton voyage ne sera ni inutile, ni imparfait. Si tu n’étais le fils d’Odysseus et de Pènélopéia, je n’espérerais pas que tu pusses accomplir ce que tu entreprends, car peu de fils sont semblables à leur père. La plupart sont moindres, peu son meilleurs que leurs parents. Mais tu ne seras ni un lâche, ni un insensé, puisque l’intelligence d’Odysseus est restée en toi, et tu dois espérer accomplir ton dessein. C’est pourquoi oublie les projets et les résolutions des Prétendants insensés, car ils ne sont ni prudents, ni équitables, et ils ne songent point à la mort et à la Kèr noire qui vont les faire périr tous en un seul jour. Ne tarde donc pas plus longtemps à faire ce que tu as résolu. Moi qui suis le compagnon de ton père, je te préparerai une nef rapide et je t’accompagnerai. Mais retourne à ta demeure te mêler aux Prétendants. Apprête nos vivres ; enferme le vin dans les amphores, et, dans les outres épaisses, la farine, moelle des