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PLATON

jour de mois thargelion (21 mai) de la troisième année de la 87e olympiade (429 avant J.-C.), et mourut dans la première année de la 108e olympiade (347 avant J.-C.). Par son père, Ariston, il paraissait descendre de Codrus, et sa mère, Périctyone, faisait remonter l’origine de sa famille à Solon. Il s’appelait d’abord Aristoclès, du nom d’un de ses oncles, et plus tard il reçut, à cause, dit-on, de la largeur de son front ou de ses épaules, le surnom de Platon : c’est Socrate qui le lui donna. La Grèce, ou plutôt l’Attique, ce petit coin du globe qui a porté dans ses flancs la civilisation du monde, était alors à l’apogée de sa splendeur. Ces génies immortels que la plastique aussi bien que la pureté de la forme littéraire a depuis lors constamment proposés pour modèles, et que l’on pourrait encore aujourd’hui, après vingt-deux siècles écoulés, invoquer comme une grave protestation contre la théorie du progrès, vivaient tous à la même époque et dans, la même ville, à Athènes, comme si Dieu avait voulu concentrer en un point unique de l’espace et du temps le lever de la culture intellectuelle de l’humanité. Sophocle, Euripide, Aristophane, Ménandre, Thucydide, Xénophon, Praxitèle, etc., étaient contemporains de Platon. Élève de Socrate, condisciple d’Alcibiade, maître d’Aristote, il avait pu, dans sa première jeunesse, admirer le grand homme d’État, ce foudre d’éloquence, Périclès. Enfin, si l’on demandait à un ami du beau et du vrai à quelle période de l’histoire il désirerait avoir vécu, il répondrait sans hésiter : au siècle de Platon.

La poésie fut d’abord pour Platon d’un puissant attrait ; fort jeune encore, il composa un poëme épique, où il s’essayait, dit-on, à égaler Homère, et ne craignit point d’entrer en lice avec les poètes les plus renommés de son temps. Il allait se livrer avec toute l’ardeur de son âge au genre lyrique quand il fit, à vingt ans, la connaissance de Socrate : dès lors il se consacra tout entier au culte de la philosophie. Cependant, il avait déjà fréquenté l’école des sophistes et abordé, sous les auspices de Cratyle, les doctrines d’Héraclite. Mais ces doctrines ne pouvaient guère convenir à un esprit qui cherchait, avant tout, la certitude de la science dans les fluctuations du doute et d’un probabilisme ondoyant. Platon s’était déjà mis en rapport avec Socrate quand il résolut de s’initier aux systèmes des Éléates et des philosophes ioniens. Ses œuvres témoignent d’une lecture attentive, assidue, des écrits de Xénophane, d’Anaxagore et de Parménide. Mais le grand maître dont il devait si éloquemment propager les doctrines lui fit bientôt rejeter de la philosophie tout ce qui ne pouvait en rien contribuer à rendre les hommes meilleurs : l’amélioration morale des membres de la société humaine, voilà le pivot de tout l’enseignement de Socrate ; Platon en profita pendant plus de dix ans. La mort tragique du véritable précurseur du Christ dispersa la plupart de ses disciples. Platon quitta Athènes et se rendit d’abord à Mégare, auprès d’Euclide qui fonda l’école mégarienne. Il quitta même la Grèce pour visiter l’Italie et l’Égypte[1]. Les doctrines de Pythagore fixèrent alors particulièrement son attention, et il nous montre dans plusieurs de ses dialogues, surtout dans le Timée et le Philèbe, qu’il avait suivi avec fruit les leçons d’Archytas de Tarente, d’Eudoxe de Cnide, ainsi que de beaucoup d’autres physiciens et mathématiciens de la même école. De l’Italie P??on[illisible] passa en Afrique : il entendit à Cyrène le philosophe Théodore, disciple de Protagoras. Puis[illisible] semblablement il visita aussi l’Égypte ; mais on ignore combien de temps il séjourna dans ce pays, antique foyer des sciences[2]. Au rapport de quelques Pères de l’Église, il alla même en Perse pour s’aboucher avec les mages, quoi qu’il n’en fasse, pas plus que des Juifs, aucune mention[3]. Après environ dix ans d’absence il revint dans sa patrie (vers 390 avant J.-C.), mais il n’y resta pas longtemps : il fit un second voyage dans l’Italie inférieure, d’où il passa en Sicile. Là il fut présenté par Dion, son ancien disciple, à Denys l’ancien, souverain de Syracuse. Ce prince l’accueillit d’abord magnifiquement ; mais Platon ne tarda pas à perdre la faveur du tyran dont il avait blâmé les excès et, sans l’intervention de Dion, il aurait été retrouvé mort. Le philosophe ne put échapper à la [illisible] de sa liberté : il fut vendu comme esclave à un Lacédémonien, homme inculte, qui le conduisit à Égine, où le racheta Dion[4], ou, suivant d’autres[5], Annicéris de Cyrène, qui était [illisible] assister aux jeux de la 98e olympiade[6]. En ??8[illisible] avant J.-C. on retrouve Platon à Athènes. C’est à cette époque qu’il faut faire remonter la fondation de l’Académie, école célèbre, où il réunissait de nombreux disciples, avides de s’instruire aux leçons du maître[7]. Après vingt

  1. On n’est pas d’accord sur l’ordre dans lequel ses voyages se sont succédé. Ainsi, Cicéron (De finibus, 29 ; Tuscul., I, 17 ; De republ., I, 10) le fait d’abord passer en Afrique, puis de là en Italie. Suivant Apulée, t. II, p. 186, édit.Oudendorp), Platon visita l’Italie avant l’Afrique. Voy. Corsini, De die natali Platoni ejus ætate, etc., dans Gorius, Symbol. litt., vol. III, p. 100, et Stallbaum, Disputatio de Platonis vita [illisible], en tête de son édition.
  2. Diodore de Sicile affirme que « Platon, Solon et Lycurgue avaient emprunté aux Égyptiens leurs institutions » (liv. capI, ch. 98).
  3. Saint August., De Civ. Dei, VIII, 11 ; XI, 21 ; et Clément d’Alex., Admonit. ad gent.
  4. Diogène de Laerte, III, 20 ; Plutarque, Dion ; Cicéron, De Orat., III, 34.
  5. Olympiodore, p. 587. Philopon. in Arist. Phys.
  6. Diodore de Sicile (XV, 7) raconte ce fait un peu différemment. D’après cet historien, les autres philosophes réunis, à la cour de Denys, se cotisèrent pour racheter Platon, qui avait été conduit, par ordre du tyran, au marché public et vendu pour vingt mines (un moins de dent mille francs).
  7. Au rapport d’Athénée, l’Académie n’était pas réellement un lieu de conférences, mais de banquets ; du reste, Platon y traitait ses convives avec beaucoup de frugalité ; c’est ce qui fit dire à Timothée, fils de [illisible]