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faTorable, si sa puissance ne lui eût assuré le triomphe sur ces hommes éminents dont il s’entourait cliaque jour : « Je recomiaîtrai toujours , disait à ce propos Favorin à ceux qui lui reprochaient de faire à la cour trop bon marché de sa science, je reconnaîti’ai toujours pour le plus savant honmie du monde celui qui commande à trente légions. » En effet, Adrien consentait volontiers à engager la discussion ; il était aussi prompt à attaquer qu’à se défendre, nous dit Spartien ; mais c’était à la condition d’être vainqueur dans la lutte, autrement son amom’-propre irritable se vengeait par des moyens indignes de lui. H composa contre Héliodore, qui avait été son favori, les libelles les plus calomnieux. Denys de Milet et Caninius Celer, qui ne s’étaient pas prêtés comme d’autres à le laisser briller à leurs dépens, furent disgraciés, et Favorin lui-même, malgré la déférence dont nous venons de citer une preuve, ne put conserver sa faveur. Aussi disait-il, à la fin de sa Aie, que trois choses l’étonnaient dans son existence : d’abord, qu’étant né Gaulois, il parlât le grec ; puis, qu’étant eunuque, il eût été accusé d’adultère ; et enfin, qu’étant haï de l’empereur, il vécût encore. Dans son enthousiasme pour la Grèce, Adrien voulut prendre place parmi ses législateurs (1). Des lois de Dracon et de celles de Soion il forma une constitution nouvelle, par laquelle il laissait le gouvernement au peuple, établissant le sénat juge naturel de toutes les affaires contentieuses, sauf appel, toutefois, devant l’empereur ou le proconsul. Puis, non content de cet acte d’autorité suprême, il accepta les charges d’archonte et d’agonothète à Athènes, comme il accepta plus tard le titre de préteur en Étrurie, d’édùe ou de duumvir dans quelques villes italiennes, et de tribun à Naples, tant sa vanité insatiable avait besoin d’aliment et de hochets. Au milieu des chefs-d’œuvre de l’architectm-e grecque, son goût pour les arts ne pouvait demeurer oisif. Peu de villes ont été plus favorisées qu’Athènes sous ce rapport ; il y éleva tant d’édifices, qu’ils y formèrent comme une cité nouvelle, séparée de l’ancienne par un arc sur lequel on lit encore d’un côté, « Ici est l’Athènes de Thésée, «  et de l’autre : « Ici est l’Athènes d’Adi-ien. » C’est à l’extrémité de cette dernière qu’il fit ériger la nef du temple de Jupiter Olympien, dont les fondements étaient jetés depuis plus de cinq cents ans. « Avant d’entrer dans ce temple, dit Pausa « nias, vous trouvez quatre statues de l’empe « reur Adrien, deux en marbre de Thasos et deux « en marbre égyptien. Devant les colonnes s’é « lèvent d’autres statues que les Athéniens ap « pellent les statues des colonies ; l’enceinte du « temple, qui n’a pas moins de quatre stades de « tour, en est aussi remplie, chaque ville eu ayant « érigé ime à l’emperem— (2) ; mais les Athéniens (i) Chron. d’Euscbe, p. : J32, éil. de Milan, 1818. [i) Plusif urs inscriptions qui ont liù être gravées sur 1rs bases de ces statues sont parvenues jusqu’à nous. On y lit le nom de « les ont toutes sui-paasées, en plaçant derrière le <t temple la statue colossale de ce prince, bien « digne d’être admirée par tous ceux qui visitent ’cet édifice (1). » On voit ainsi qu’en honorant les dieux, l’un des principaux mobiles d’Adrien était de s’honorer lui-même. Il avait en outre élevé un temple à Junon, un autre à Jupiter Panhellénien, et déployé toute sa magnificence dans des portiques formés par cent vingt colonnes de marbre de Phrygie dont les murs étaient construits du même marbre, et dont les salles, décorées de statues ou de tableaux, avaient des plafonds couverts d’or et d’albâtre. C’était là qu’à l’exemple d’Hérode Atticus et de Théogène de Gnide, son maître, il avait fondé en faveur des citoyens d’Athènes une riche bibliothèque. Le gymnase qui portait le nom d’Adrien, et qui était orné de cent colonnes de marbre de Libye, était attenant à ces portiques. Aussi Pausanias ajoute-t-il que, par reconnaissance, une des tribus d’Athènes avait pris son nom, et qu’iuie inscription gravée dans le Panthéon mentionnait tous les actes de sa munificence (2). Tant de chefs-d’œuvre ne furent pas accomplis en un voyage. Ce qui paraît probable, d’après saint Jérôme et la Chronique d’Eusèbe, c’est que ce fut alors (an de J.— C. 125) qu’Adrien voulut être initié aux mystères d’Eleusis, preuve nouvelle de cette insatiable curiosité qui tenait à soulever tous les voiles. C’est à l’époque de l’initiation d’Adrien que Quadratus, évêque d’Athènes, lui présenta une apologie de la religion chrétienne. On a cru généralement que, faisant droit aux vérités énoncées dans la supplique de Quadratus, l’empereur fit suspendre la persécution (3). Eusèbe nous a même conservé le rescrit adressé, dans cette occasion, à Minutius Fondatus, proconsul d’Asie : « Si quelqu’un accuse les chrétiens, y est-il dit, et prouve qu’ils font quelque chose contre les lois, jugez-les selon la faute qu’ils auront commise ; s’ils sont calom niés, punissez le calomniateur (4). « Toutefois le bienfait était plus apparent que réel. Les accusateurs sont tenus de prouver, il est vrai, que les chrétiens pèchent contre la loi ; mais cette loi condamne la pratique de leur religion : il n’y a donc plus qu’à démontrer qu’ils sont fidèles à l’observation de leur culte. La preuve que la persécution ne cessa pas, bien qu’elle ait été beaucoup moins violente qu’à d’autres époques, c’est que le philosophe Aristide était obligé, quelques années plus tard, de remettre à l’emperem* une nouvelle supphque en faveur des chrétiens. l’empereur, auquel la plupart d’entre elles donnent le surnom d’Olympien, et le nom de la ville qui consacrait le monument. Telles sont celles où se tiouvent le nom de Thasos ( Spon, Voyage, t. Il, p. 233), de Sestos (Murât., p. ccxxxv, 5), d’Amphipolis (Spon, p. 284), de Céphallénic ( Rcinesius, p. 335), de Sébastopolis (Murât, , p. MLxxxi, I), d’Abydos (Spon, p. 285), de Milet ( Murât., p. mlix, 2), etc. (1) Lib. l, c. xvirr. (2) I, ib. I, rh. V. (3) Voyez Hodwell, De paticit. martyr., § XXXII, tid cale., éd. s. (Jyprian, , p. 76. (4) Voyez, Eusèbe, Hist. Ecoes., lib. IV, et Chron., p. 383, M. de Mgr Mai.