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En présence de cette seule partie de son œuvre, on s'étonne que la postérité n'ait pas été plus juste envers un si grand philosophe.

Pendant tout le Moyen-Âge, on s'était pour ainsi dire borné à compulser et à discuter les textes d'Aristote et de l’Écriture ; on s'était accoutumé à considérer tout ce qu'ils contiennent comme des vérités certaines et absolues dont il suffit de partir pour parvenir par déduction à toutes les autres vérités. Le savoir systématisé d'alors pourrait être comparé à un édifice qui manquant de base menaçait d'autant plus ruine qu'il augmentait de proportions.

À ceux qui conçurent, au début du XVIIe siècle, le dessein de donner des règles pour la construction d'un édifice durable, plusieurs tâches s'imposaient : il fallait d'abord faire comprendre aux hommes, et, c'était ce qui pressait le plus, que plus on dispose de matériaux, plus aisément l'on peut construire solide, qu'on avait donc eu tort d'en interrompre la récolte ; il fallait rappeler, puisqu'on semblait l'avoir trop généralement oublié, comment cette récolte se pratique et par quels procédés on peut arriver à séparer les pierres solides de celles qui ne le sont point. Ce fut ce côté de la question que F. Bacon envisagea surtout. Hobbes, lui, prétend montrer comment on construit la Science, et, avec les matériaux dont il dispose, il se met à l'œuvre. Ces matériaux d'ailleurs, quoi qu'on en ait pu dire, il est loin de les mépriser et d'en méconnaître la valeur. Il connaît, juge et apprécie les découvertes de Copernic, de Galilée, d'Harvey, de Képler, les travaux de tous les vrais savants de son temps. Mais il sait voir que la Science ne commence qu'avec la synthèse que notre raison fait de ses