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Compte (c’est-à-dire des significations des] noms établies par définitions)[1] perd son temps, ne parvient pas à une connaissance, mais seulement à une croyance.

De l’Erreur et de l’Absurdité. — Quand on raisonne sans se servir de mots, ce qui peut se faire pour les choses particulières[2] (comme quand, à la vue d’une chose, on conjecture ce qui doit l’avoir précédée ou ce qui vraisemblablement la suivra), si ce qu’on pensait devoir la suivre ne la suit pas, ou si ce qu’on pensait l’avoir précédée ne l’a pas précédée, il y a[3] ce qu’on appelle Erreur ; et les plus prudents eux-mêmes sont sujets à l’erreur. Mais quand on Raisonne[4] sur des Mots de signification générale, et, qu’on aboutit à une conclusion générale qui est fausse, quoiqu’on dise communément qu’il y ait Erreur, il y a en réalité Absurdité, c’est-à-dire Discours dépourvu de sens. L’Erreur n’est en effet qu’une déception dans la présomption qu’est passée ou à venir une chose qui, bien qu’elle ne soit point passée ou bien qu’elle ne soit point à venir, ne comporte cependant à ces points de vue aucune impossibilité discernable[5]. Mais, quand on émet une assertion générale[6], si elle n’est pas vraie, sa possibilité[7] est inconcevable. Et les mots

  1. Le latin dit : « des articles (nominibus) particuliers ».
  2. « {{lang|la|in particular things}} » en anglais ; « in nominibus Individuis » en latin.
  3. Le latin ajoute : « chez celui qui raisonne ».
  4. Dans la première alternative (ligne 5) l’anglais porte « reckons », le latin « ratiocinatur ». Ici par contre le texte anglais use du verbe to reason.
  5. Le latin dit : « … dans la présomption du passé ou de l’avenir, présomption qui, bien qu’elle ne se soit pas vérifiée, ne peut cependant être regardée comme impossible ».
  6. Le latin dit : « conclusion universelle ».
  7. Le latin dit : « elle ».