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À huit heures, au moment où les religieux venaient de terminer un service anniversaire pour le repos de l’âme de Charles-Albert, de violents coups de clochette retentirent à la porte du monastère, soigneusement fermée depuis quelques jours. Sur la demande qui lui fut faite, l’agent des Domaines répondit qu’il était chargé de prendre possession de l’abbaye. L’abbé dom Félix se présenta alors à la grille du parloir, formula une protestation énergique et déclara qu’il n’ouvrirait pas. De leur côté, MM. les curés de Saint-Pierre de Curtille, d’Ontex et de Lucey protestèrent en vertu de la donation de Charles-Félix, qui chargeait les Pères d’Hautecombe de faire des aumônes et de porter des secours religieux aux paroisses environnantes.

Quelques instants après, les marteaux et les pics retentissaient, la porte d’entrée et trois autres portes intérieures sautaient, laissant passer à travers des panneaux brisés et des serrures broyées les agents de l’incamération. Ils parcoururent toutes les pièces du monastère en dressant un inventaire minutieux de chaque objet, respectèrent néanmoins le lieu saint et ne firent que jeter un coup d’œil sur le mobilier de la sacristie. Dans l’après-midi, ils prirent possession des fermes annexées à l’abbaye. Leur mission était remplie : la caisse ecclésiastique nomma ensuite un administrateur des biens d’Hautecombe.

Avant même de faire procéder à cette formalité, l’administration des Domaines s’était vue assignée par la communauté pour faire cesser le trouble qu’elle lui avait causé en la prévenant officiellement de la future prise de possession du monastère. Sur cette action en jactance, admise par les lois de cette époque, fut échafaudé un procès qui, d’exceptions en exceptions, de procédures en procédures, sauva l’abbaye. Un arrêt de la Cour de Chambéry, du 29 juillet