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SAVANTS ET ÉCRIVAINS

magnanime, profonde, profonde comme la nuit, comme elle pleine de lueurs lointaines. Sois mon maître, adopte-moi, je souffre infiniment, je gravite autour de la vérité, je ne l’atteins jamais. »

Depuis nous retrouvons à chaque instant le nom de Pascal dans les premières poésies, et dans le poème du Bonheur, c’est encore Pascal qui apparaît à Faustus pour le rassurer et le consoler. Enfin cette image, qui ne cesse de le hanter, inspire à Sully un livre très fouillé où il cherche à reconstruire le plan de Pascal et à restituer l’ordre des Pensées.

L’âme de Pascal était pour lui un mystère attirant parce qu’elle ressemblait singulièrement à la sienne et qu’en même temps elle en différait profondément. C’étaient les mêmes combats entre la raison froide et implacable et les aspirations du cœur. Mais ces aspirations étaient plus ardentes, plus fougueuses, plus irrésistibles et surtout plus impitoyables. Pascal était plus passionné que tendre ; dans ses élans charitables, ce n’étaient pas les hommes qu’il aimait, mais uniquement