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SULLY PRUDHOMME

ophtalmie l’obligea à interrompre ses études. Renonçant alors à la carrière scientifique, il se retira à Lyon chez des parentes pour se préparer au baccalauréat ès-lettres. C’est là, dans un milieu profondément chrétien, qu’il subit une crise ardente de mysticisme, dernier éclair de sa foi expirante.

Cependant, il fallait « faire quelque chose. » Grâce à la protection de M. Schneider, il trouva une petite position au Creusot, mais il n’y resta, nous dit-il, que le temps nécessaire pour reconnaître à quel point il s’était fourvoyé. Il revint alors à Paris et commença à travailler chez un notaire. Hélas, son âme de poète ne devait pas trouver plus de satisfactions dans le notariat que dans l’industrie.

Les clercs de notaire sont, paraît-il, exposés à de singulières mésaventures. Sully Prudhomme fut chargé par son patron d’aller réclamer je ne sais quelle somme à un certain M. Fouet. Ce commerçant, qui ne se doutait guère que son nom aurait un jour l’honneur de retentir sous cette coupole, chercha d’abord à l’éconduire et finit par l’accuser d’escro-