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commencent à devenir un embarras. Peut-être faudra-t-il choisir, mais alors il faudra bien choisir ; ce qu’il faudra conserver c’est ce qui peut former et élever les âmes, ce qui apprend à apprendre, à penser, à comprendre. L’École doit former des esprits et non des aide-mémoire ambulants.

N’imitons pas les auteurs des trop célèbres programmes de 1850, qui ont voulu nous infliger dix années de pesante obscurité. Ces hommes, dont quelques-uns étaient éminents, savaient bien ce qu’ils faisaient. S’ils avaient peur de la pensée désintéressée, c’est qu’ils savaient qu’elle est libératrice. Malgré le mal passager qu’ils nous ont fait, ils nous ont du moins rendu un service, ils nous ont avertis. Ce qu’ils ont voulu, nous ne pouvons le vouloir, puisqu’ils nous ont laissé voir pourquoi ils le voulaient. Ceux qui aiment la liberté craindront de leur ressembler et on peut être certain qu’ils ne se laisseront plus séduire par les sophismes des praticiens intransigeants.

L’École doit se transformer peu à peu comme toutes les choses humaines, mais il