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Tel n’est pas le point de vue de Weierstrass. Dès qu’il a élevé une construction, il oublie de quels matériaux elle est faite et n’y veut plus voir qu’une unité nouvelle dont il fera les éléments d’une construction plus grandiose. Il peut le faire sans crainte, car il en a, une fois pour toutes, éprouvé la solidité.

Ces unités intermédiaires ne sont sans doute que des auxiliaires ; mais notre esprit est si faible qu’il ne peut s’en passer ; car il ne peut percevoir à la fois tous les détails d’un grand ensemble. Ces artifices sont donc nécessaires si l’on veut marcher toujours en avant et c’est là justement ce que veut Weierstrass. Kronecker, lui aussi, a bien fait des découvertes, mais s’il y est arrivé, c’est en oubliant qu’il était philosophe et en délaissant lui-même ses principes qui étaient condamnés d’avance à la stérilité.

Weierstrass procède donc par construction en partant du nombre entier ; il marche ainsi toujours du simple au composé. Il se distingue par cette tendance d’autres analystes qui partant du général et de l’indéterminé et qui le