Page:Henri Poincaré - Savants et écrivains, 1910.djvu/147

Cette page a été validée par deux contributeurs.

encourager ; mais, en même temps, il les prémunissait contre les écueils sur lesquels leur ardeur juvénile aurait pu les entraîner. Ceux qui avaient accepté sa discipline ne tardaient pas à en reconnaître la sagesse.

On s’explique ainsi l’influence qu’il exerçait sur tous, sur ses élèves, sur ses amis, sur les savants, sur les praticiens. La droiture de son caractère, la simplicité de sa vie, la sûreté de ses amitiés augmentaient encore son autorité. Tous croyaient qu’il en jouirait longtemps encore. Aussi quelle stupeur, quel deuil universel, quand on apprit qu’il n’était plus.

Quand la mort nous enlève un homme dont la tâche est terminée, c’est seulement l’ami, le maître ou le conseiller que nous pleurons ; mais nous savons que son œuvre est accomplie et, à défaut de ses conseils, ses exemples nous restent. Combien elle nous semble plus impitoyable quand c’est un savant encore tout rempli de vigueur physique, de force morale, de jeunesse d’esprit, d’activité féconde, qui soudain disparaît ; alors nos regrets sont sans bornes, car ce que nous perdons, c’est