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chait dans l’étude, ce n’était pas le succès, mais le savoir ; malheureusement, le chemin le plus court vers ces premiers rangs si ardemment convoités n’est pas toujours le travail original et libre qui fait perdre de vue le but auquel d’autres pensent sans cesse.

Devenu officier d’artillerie et envoyé à Metz, à Mutzig, puis à Strasbourg, il ne publia rien pendant dix ans. Il remplissait ses devoirs militaires avec une scrupuleuse ponctualité, et ses camarades pouvaient croire que sa profession l’absorbait tout entier. Ils se trompaient. Laguerre poursuivait silencieusement les études qu’il avait si brillamment commencées et accumulait d’importants matériaux.

Quand il revint à Paris, en 1864, pour remplir les fonctions de répétiteur à l’École Polytechnique, il lui eût été facile, en dévoilant les secrets qu’il devait à dix ans de travail, de publier un important volume de géométrie qui l’eût immédiatement classé hors de pair. Il n’en fit rien ; les idées générales n’avaient de prix, à ses yeux, que par les applications particulières où elles pouvaient