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poussée trop loin car le fluide inducteur est incompressible, propriété dont ne jouit pas l’air auquel nous l’avons comparé. Cette image n’est donc utile que pour faire comprendre l’effet de l’une des propriétés de ce fluide : son élasticité.

24. Tout courant est un courant fermé. — Le rôle prépondérant attribué par Maxwell aux diélectriques, qui dans la théorie ordinaire jouent un rôle passif, n’est pas la seule différence qui existe entre cette dernière théorie et celle de Maxwell. Une autre différence provient de la nature des courants.

Dans la théorie ordinaire on admet l’existence de deux sortes de courants : les courants fermés, en général permanents, et les courants ouverts, en général instantanés, qui cessent quand par l’effet de la charge il se produit une différence de potentiel égale à la force électromotrice de la source électrique. Ces courants ouverts se produisent lorsque, par exemple, on met les pôles d’une pile en communication avec deux conducteurs ou avec les deux armatures d’un condensateur.

Dans la nouvelle théorie il ne peut y avoir que des courants fermés. En effet, considérons le courant ouvert qui prend naissance quand nous mettons les pôles d’une pile en communication avec deux conducteurs isolés A et B. Le conducteur qui, en adoptant le langage de la théorie ordinaire, se charge positivement, doit prendre, d’après la théorie de Maxwell, une quantité de fluide électrique plus grande que celle qu’il possède à l’état neutre. Dans l’autre conducteur, au contraire, la quantité de fluide électrique doit diminuer. Mais le fluide électrique étant incompressible, sa densité demeure constante et on ne peut concevoir qu’il y ait condensation de ce fluide en un point et raréfaction en un autre. Pour concilier cette conséquence de l’incompressibilité du fluide électrique avec le fait expérimental de l’existence du courant, Maxwell fait intervenir le fluide inducteur qui remplit le diélectrique isolant les deux conducteurs : le fluide électrique sort de l’un des conducteurs, déplace le fluide inducteur du diélectrique et fait rentrer dans l’autre conducteur une quantité de fluide inducteur égale à la quantité de fluide électrique sortie du premier. Il y a donc fermeture du courant à travers le diélectrique et comme les molécules du fluide induc-