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peinture.

Jésus de Raphaël, sont, sous ce rapport, bien supérieurs.

Un sujet non moins conforme au but de l’art est l’histoire de la Passion : le Christ bafoué, couronné d’épines, l’Ecce homo, le sauveur portant sa croix, le crucifiement, la descente de croix, la mise au tombeau, etc. Car ici c’est précisément la divinité dans rabaissement de sa puissance, de sa sagesse infinie, en opposition avec son triomphe, qui fait le sujet de la représentation. Or, non seulement l’art est encore capable de le représenter, mais, en même temps, il offre, à l’originalité de la conception une vaste carrière, où elle peut se déployer sans se perdre dans le fantastique. C’est Dieu qui souffre en tant qu’il est homme et s’est soumis à la condition mortelle. La souffrance qui apparaît comme souffrance humaine au-dessus de la destinée humaine, sort, il est vrai des limites naturelles ; c’est le sentiment d’un mal infini ; mais elle se manifeste toujours sous les traits de la figure humaine. Toutefois, comme c’est Dieu qui souffre, il se révèle un adoucissement, un amoindrissement de la souffrance qui ne peut aller jusqu’à l’expression des textures extérieures, jusqu’aux déchirements et jusqu’à l’horrible. Cette expression des souffrances de l’ame est, particulièrement chez les maîtres italiens, une création tout à fait originale. Le sérieux de la douleur n’est que dans la partie inférieure du visage. Ce ne sont pas, comme dans le Laocoon, des contractions des muscles, qui pourraient signifier des cris ;