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peinture.

jours la forme essentielle de la représentation. Au contraire, dans le pur rayon de la félicité qui pénètre l’amour divin, l’individualité a disparu. Devant Dieu tous les hommes sont égaux, ou plutôt la sainteté les rend réellement égaux. De sorte que c’est uniquement la concentration de l’amour telle que nous l’avons décrite, qu’il s’agit d’exprimer et qui, en même temps, n’a pas besoin du bonheur de tel ou tel individu pris en particulier. Sans doute, l’amour religieux réclame aussi des individus déterminés, qui, en dehors de ce sentiment, se développent dans un autre cercle d’existence ; mais alors il perd quelque chose de sa profondeur mystique et s’écarte du pur idéal. Il ne trouve pas, d’ailleurs, dans les diversités originales du caractère et du talent, dans leurs relations et les accidents de leur destinée, sa vraie manifestation et sa réalité ; il doit plutôt dominer tout cela.

Ainsi, on entend répéter de nos jours que, soit dans l’éducation, soit dans le choix des vocations, il faut surtout faire attention à la diversité des caractères ; d’où dérive également ce principe, que les individus doivent être traités différemment et que chacun a le droit se conduire à sa guise. Cette façon de penser est tout-à-fait en opposition avec l’amour religieux dans lequel s’effacent de pareilles diversités. Toutefois, le caractère individuel, précisément parce qu’il est la chose non essentielle, qui.d’ailleurs ne s’efface pas complètement, même dans le règne spirituel et céleste de l’amour, présente ici une plus grande détermination,