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peinture.

apparence comme telle ; c’est-à-dire jusqu’au point où le fond devient quelque chose d’indifférent, et l’illusion artistique l’intérêt principal. Mous voyons alors l’art mettre sa perfection à fixer sur la toile les changements les plus fugitifs du ciel aux différentes heures du jour, la couleur des bois diversement éclairés, l’apparence et le reflet des nuages, des vagues, des lacs et des fleuves, l’éclat transparent du vin dans les verres, le brillant des yeux, ce qu’il y a d’instantané dans le regard, dans le rire, etc. La peinture passe ici de l’idéal à la réalité vivante ; elle reproduit les effets de ces apparences, principalement par l’exactitude de l’exécution, la fidélité avec laquelle chaque partie, chaque détail sont rendus. Toutefois, ce n’est nullement une simple habileté mécanique, c’est une exactitude, une finesse pleine de talent, qui achève chaque particularité pour elle-même, et cependant maintient les parties du tout dans leurs rapports et leur fusion intime ; ce qui exige le plus grand art. Ici, maintenant, la vitalité ainsi obtenue dans la représentation du réel semble quelque chose de plus élevé que l’idéal. Ce qui explique pourquoi, dans aucun autre art, on n’a autant disputé sur l’idéal et la nature, ainsi que je l’ai exposé longuement dans un autre endroit. Sans doute on pourrait, dans des sujets aussi peu importants, blâmer l’application de tous les moyens artistiques, comme une prodigalité. La peinture ne peut, cependant, se priver de ces sortes de sujets qui, de leur côté, ne sont propres qu’à être