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introduction.

pouvons nous expliquer ceci rationnellement. En effet, quoique le sujet représenté soit concentré, renfermé en lui-même, lorsque, dans l’art, il se manifeste et prend en quelque sorte la peine d’exister pour nous, de quitter sa simplicité, de sortir de cet état de concentration pour passer à la vie active, individuelle, entrer dans le monde de la division et de la variété, ce passage doit s’exprimer comme une sorte de complaisance de la part du personnage, en tant qu’il ne paraît pas avoir besoin pour lui-même de cette existence concrète et animée, et cependant s’y abandonne complétement en notre faveur. Une pareille grace ne peut cependant se maintenir à ce dégré qu’autant que l’élément essentiel paraît se suffire à lui-même, insouciant à l’égard de ses charmes extérieurs, qui fleurissent à la surface comme une sorte de superfluité. Cette indifférence qui naît d’une sécurité profonde, ce calme d’une existence absolue qui a conscience d’elle-même, constitue le bel abandon de la grace, laquelle n’attache aucun prix à cette manifestation d’elle-même. C’est ici également qu’il faut chercher le caractère élevé du beau style. L’art véritablement beau et libre est sans souci de la forme extérieure, dans laquelle il ne laisse percer aucun retour sur soi-même, aucune attention, aucun dessein prémédité. Dans chaque expression, chaque air ou manière d’être extérieure, il n’a en vue que l’idée et l’ame du tout. C’est seulement par là que se conserve l’idéal du beau style, qui n’est ni rude, ni sévère,