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ce côté-là principalement que nous devons l’envisager, sans néanmoins dissimuler ses défauts.

En reprenant les défauts d’un ouvrage, nous devons surtout avoir grand soin d’en respecter l’auteur ; mais la réputation d’un écrivain ne doit jamais entrer pour rien dans le jugement que nous portons de ses écrits[1].


Dans le volume suivant, il revient avec plus de développements sur ces difficultés du métier.


On se plaint continuellement de la partialité qui règne dans la plupart des critiques ; on trouve qu’on loue toujours trop ou trop peu, et l’on prétend qu’il n’entre presque jamais assez d’équité dans les jugements qu’on porte sur le mérite des auteurs et sur la bonté ou les défauts de leurs ouvrages. J’avoue que ces plaintes ne sont quelquefois que trop bien fondées, et qu’il serait à souhaiter que ce fût toujours l’esprit de vérité, de désintéressement et de droiture qui présidât aux décisions de ceux qui s’érigent en tribunal particulier sur le Parnasse. Mais n’aurions-nous pas à nous plaindre aussi, de notre côté, et les lecteurs eux-mêmes ne s’écartent-ils jamais, à notre égard, des règles d’intégrité et de justice qu’ils nous prescrivent ? Nous jugeons les auteurs, et le public nous juge ; mais, dans ce public, combien de particuliers nous jugent mal ! Les uns le font par ignorance, les autres par prévention ; ceux-ci par intérêt, ceux-là par ressentiment ; quelques-uns par mauvaise volonté, plusieurs par esprit de parti ; presque tous par envie de censurer et de contredire…

Voilà les différentes sources d’où partent les jugements de la plupart de ceux qui taxent les nôtres de partialité et d’injustice. Ils ont bonne grâce de nous reprocher des défauts dont ils sont eux-mêmes les premiers coupables ! En quoi je les trouve tout-à-fait inexcusables, car enfin, s’ils font le mal, c’est malice toute

  1. Observations sur la Littérature moderne, t. i, p. 3.