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d’orgueil où ce fougueux économiste était entraîné par la double impulsion de l’esprit de secte et d’un caractère naturellement altier et inflexible.


On est tout étonné de mon intrépidité, écrit-il au bailli de Mirabeau. Je t’ai conté avec quelle audace patente je me suis opposé ferme à toutes les mesures prises et déjà avouées pour dédier les Éphémérides à M. le Dauphin (depuis Louis XVI). J’ai tout fait rejeter sur moi, et n’ai rien dit, sinon qu’il n’avait qu’à nous mériter, que jusque-la c’était bassesse ; et dans ce même temps, je vais, malgré mes trembleurs, dédier mes Économiques au grand-duc de Toscane.

… Le docteur Quesnay avait manigancé cette idée dès il y a deux ans ; mais notre franc et regrettable abbé (Baudeau) envoya tout au diable, en disant qu’il voulait être libre et je trouvai qu’il avait raison. À la fin de l’année dernière, j’appris tout à coup, par une indiscrétion, que la chose était faite pour le commencement de celle-ci, et l’épître prête et agréée. Nos plus sages amis dirent que c’était nous embarquer dans une cabale et nous mettre en butte à l’autre, tromper les provinces, qui avaient compté sur de la liberté, critiquer et approuver du haut en bas.

Quant à moi, je tins à mon dire, qu’il fallait que les princes nous méritassent par des faits, ou, du moins, par des sentiments hautement professés. Dans ces sortes de conseils, il s’agit toujours de qui attachera le grelot, et il est vrai que c’est ma vocation un peu trop marquée. Je pris donc tout sur moi, et déclarai net que je quittais et désavouais les Éphémérides, sitôt qu’elles prendraient une enseigne de cour.


Aussi hautain et frondeur que son frère, mais toujours contre les abus, rarement contre l’autorité royale, le bailli n’approuvait pas cette fanfaronnade du marquis.


Je ne suis pas de ton avis, si tu as été à même de présenter ou