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Carnusat, cette fois, céda-t-il à l’évidence, ou s’obstina-t-il à continuer sous le masque de l’anonyme une lutte impossible ? C’est ce que nous ne saurions dire. On l’avait soupçonné d’être pour quelque chose dans la Critique désintéressée, dont nous avons parlé plus haut ; on lui attribua encore un Spectateur littéraire qui parut à Paris en 1728, et que ses critiques par trop vives firent également supprimer par la police après quelques numéros ; mais ce ne sont là que des conjectures[1].

Camusat, dit encore son éditeur, était de mœurs douces et polies ; sa conversation marquait de la modestie ; il parlait alors avec justesse et jugeait avec retenue. Il est vraiment regrettable qu’il n’ait pu conserver la même modération quand il avait la plume à la main, car il avait beaucoup des qualités qui font le vrai critique, et il aurait pu contribuer efficacement à relever le journalisme du discrédit où il était tombé, « déshonoré qu’il avait été par une multitude de feuilles que publièrent à l’envi des libraires avides, et que des écrivains obscurs remplirent d’extraits infidèles, d’inepties et de mensonges. » C’est Voltaire qui parle ainsi, et il ajoute que « rien n’a plus nui à la littérature, plus répandu le mauvais goût et plus confondu le vrai avec le faux[2]. » Voltaire, il est vrai, n’était pas

  1. Il y eut encore un autre Spectateur littéraire, ou Réflexions désintéressée sur quelques Ouvrages nouveaux, en 1746, in-12.
  2. Siècle de Louis XIV. Il dit encore : « Enfin on est parvenu jusqu’à faire un