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Le beau monsieur de Benserade,
Qu’on prit peine aussi de voler,
Dont il ne se peut consoler.
À la clarté de la bougie,
Il avait fait une élégie
Que l’on lira de son gousset,
S’il en fut fâché, Dieu le sait !
Plus, une ode toute divine
Sur le sujet d’une blondine.
On lui prit aussi tout de gob
Son ravissant sonnet sur Job,
Que, par raison ou par manie,
Plusieurs aimaient mieux qu’Uranie,
Quelques vers pour la Saint-Mégrin,
D’autres pour monsieur Mazarin ;
Item, une heureuse anagramme
Finie en pointe d’épigramme,
Deux ou trois chansons pour Philis,
Des stances pour Amarilis,
Des paroles pour Amarante
Faites sur l’air d’une courante ;
Un beau sixain de quatre vers,
Dix ou douze fragments divers,
Et des pièces, enfin, si belles,
Qu’il en eut des douleurs mortelles.
Quand il fut arrivé chez lui,
Plein d’inquiétude et d’ennui,
Il dit, fouillant dans sa pochette :
« Grands Dieux ! quelle perte ai-je faite !
Que mon malheur est sans égal !
Qu’on m’a pris un beau madrigal !
Las ! je vois que je suis moins riche
Que je n’étais d’un acrostiche !
Ô mes triolets bien aimés !
Ô chers et subtils bouts rimés !