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introduction

ces paroles : « Onésicrite n’en dit rien de très bon ; il rapporte[1]… que tout ce qui est en dehors des murs de la capitale des Bactriens est sans souillure, mais que l’intérieur est plein d’ossements humains, et qu’Alexandre fit cesser cette coutume. » Il s’agit évidemment dans ces deux passages des Dakhmas, de ces cimetières zoroastriens dont le Vendidâd parle en maint endroit, et dans lesquels on laissait pourrir les cadavres jusqu’à ce que leur poussière se fut confondue avec celle du sol. C’était donc au sud-ouest de la mer Caspienne, que l’on observait les prescriptions de l’Avesta ; c’était aussi en Bactriane, qu’Alexandre trouva cette coutume établie ; car Onésicrite donne cela comme un trait de mœurs propre à ce pays ; c’était là donc que l’on observait les prescriptions du Vendidâd dans toute leur rigueur. En Perse, le prince grec n’avait rencontre rien de semblable.
On pourrait trouver dans ce texte la solution d’une autre difficulté qui préoccupe vivement les éranistes. Cette interdiction, qu’Alexandre lança contre le mode avestique de traitement des cadavres, n’est-elle pas la source de la réputation de persécuteur que les Perses ont faite au prince macédonien et que celui-ci ne semble pas avoir meritée ? Peut-être Alexandre fit-il briller les parties de l’Avesta qui concernaient les Dakhmas et justifia-t-il ainsi, jusqu’à un certain point, les accusations des Perses, mais ceci est étranger à notre sujet.
Les conséquences que nous avons tirées des paroles de Darius et des témoignages de l’antiquité grecque sont confirmées par l’Avesta lui-même. Le Fargard I du Vendidâd restreint la propagation des doctrines dualistiques à l’Éran oriental et aux contrées de la Médie qui l’avoisinent. Du côté de la Perse, la terre avestique ne dépasse pas Hérat. L’époque à laquelle ce tableau se réfère est malheureusement inconnue[2], il prouve toutefois que la foi de Zoroastre régna dans l’est de l’Éran longtemps avant d’avoir pénétré en Perse. La religion de ce pays, sous les premiers Achéménides, était donc, bien probablement, telle que la dépeint Hérodote. Elle avait pour fondement la croyance en Ahura-Mazda, le dieu suprême de l’Éan, et à quelques génies antiques, enfin à ce culte des éléments dont le Zartûsi Nâmeh (ch. lxvii) indique clairement la nature :
« Bikôshand tâ gôdharân har cahâr bidârand pâkêzah vabê havâdr zarukhshand âtesh zâb ravân zabâd ratêq va zakhâh girân, kah zabun câr gôhar tan ijânvar sarasht ast dâdâr firôzgar.  »
« Que l’on s’efforce de maintenir chacun des quatre éléments purs et sans viciation, tant le feu brillant, l’eau mobile et le vent léger que la terre lourde. Car du fond des quatre éléments, le dieu justicier et tout-puissant a compose, en les mêlant, le corps de l’être vivant.  »[3]
  1. Τὰ ἒξω τείχου τἔς πητροπόλειως τὤν Βάϰτρων ϰαθαρὰ, τὤν δ’ ἐντὸς τὸ πλέον ὀσστέων πλἤϱες άνδρωϰίνων, ϰαταλὔσαι δὲ τὸν νόυον Αλέξανδρον.
  2. On pourrait en trouver un indice dans la dégénérescence grammaticale du zend que l’on constate déjà dans ce chapitre. Ainsi l’on y voit le datif dahâkâi (70) pour le génitif et d’autres fautes du même genre.
  3. De même, le proemium du Sad-der porte : khodâyi kab hô jism ô jân hafrêd ; kah az hunesur hô samd hard gardân zamîn muhtakif.