Page:Haraucourt - La Peur, 1907.djvu/34

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
10
LA PEUR

vanité prévalut sur toute considération sentimentale. Les fiançailles furent solennelles.

Don José ne se dissimulait en aucune sorte les répugnances de la señorina, mais il n’en avait point souci : que sa propre volonté fût accomplie, cela lui suffisait.

— J’en aime un autre, lui dit sa fiancée.

— Eh bien ! Mademoiselle, vous l’oublierez.

La prudence du père et la défiance naturelle de don José appréhendaient que les amoureux eussent recours à des moyens extrêmes pour rendre irréalisable le mariage projeté, et pour imposer le leur par un fait accompli : Mercédès n’y eût certes pas fait de résistance, et mon frère eût osé un enlèvement au risque de compromettre sa carrière par le scandale d’une telle équipée.

Mais rien de semblable n’arriva, car toutes mesures avaient été prises pour empêcher désormais une rencontre des deux amants : doña Mercédès et Miguel ne se revirent plus.

Si donc la fiancée n’apportait pas à son époux un cœur intact et libre, il n’avait du moins à se plaindre d’aucun grief plus grave, et don José n’en demandait pas davantage.