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LA PEUR

cadre de cuivre, qui écorche ses doigts. Il recule ; nous sommes face à face, pour la seconde fois, en bataille ; je dois être aussi blême que lui. Mais je me dompte :

— Excuse-moi. Je suis très jaloux.

— Même brutal. Elle est gentille.

— Tais-toi ! Ne me pousse pas !… D’abord, tu ne peux pas comprendre ce que tu faisais là ; elles sont mortes… Je t’expliquerai plus tard, et tout au long ; ce sera très long, mais ça t’intéressera, je te promets.

Il répond avec indifférence :

— Ah ?

Et moi, pour ne pas les laisser avec leur assassin, dans cette chambre, je les prends sur mon cœur ; je les emporte ; nous reviendrons tous trois, ce soir.

— À ce soir !

— Tu persistes à m’enfermer ?

— Non, si ça te tracasse… Voilà une double clef, mais, je t’en conjure, ne bouge pas d’ici, où tu es en sûreté. À ce soir.

La clef que je lui donne calme ses méfiances nouvelles : il ne sait pas que ma porte est munie d’une serrure de sûreté, et je m’esquive avant qu’il s’en aperçoive. Je le boucle.