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LA PEUR

l’étage suivant, pour me cacher par delà le tournant ; avec des sens aiguisés, j’écoutais, discernant et analysant les bruits, ceux de la rue, qui entraient par des fenêtres, ceux de l’appartement, qui venaient vers la porte…

On marche, on vient… On l’a touchée, la porte, de l’autre côté ! On écoute, derrière ! Son oreille est appliquée au bois que mon oreille vient de chauffer. Ah ! comme j’entends, comme je vois ! On va ouvrir ! Sûrement, on va ouvrir avant deux secondes, on ouvre déjà ! On ouvre de la main gauche, et ce n’est pas la main qui a lancé la bombe, mais c’est l’homme ! Je suis plus sûr que jamais. Pourquoi a-t-il tardé tant à partir ? On expliquera cela plus tard, et qu’importe, puisque c’est lui qui vient à moi ! Silence, mon cœur, tu bats trop fort, on va t’entendre aussi…

La porte s’entre-bâille avec prudence, et j’encourage électriquement celui qui n’ose pas encore sortir : « Viens donc… Il n’y a personne… Viens donc… »

Il se décide… Il ouvre. Il se hasarde… Sa tête est déjà dehors. Il est rassuré, maintenant, par l’escalier désert. Je ne veux plus