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— IX —


cables du spleen, la déroute des sens surmenés, l’adorable douleur des lents baisers qui boivent, le peintre qui nous a initié aux charmes mélancoliques des saisons pluvieuses et des joies en ruine, j’ai nommé le prodigieux artiste qui a gerbé les Fleurs du Mal, Charles Baudelaire !

Eh bien ! un peintre Belge, M. Théodore Hannon qui, malgré des souvenirs obsédants, se montre dans ses Rimes de joie, un poète singulier et neuf, a, bravement, avec certaines pièces de ce livre, emboîté le pas, derrière le grand maître. S’il n’a, ni son allure puissante, ni ses douleurs hautaines, ni ses profondes ironies, il possède du moins des qualités de jeunesse avancée charmantes ! si, parfois, surtout, dans son premier recueil : « Les Vingt-quatre coups de Sonnet. » il se lamente et pleure son infidèle ; si comme tout jeune poète qui se respecte, il célèbre les grâces de sa maîtresse et éprouve le besoin de la maudire quand elle le trahit ou le lâche, il n’a point cette rancœur si moderne, née de cet ennui et de cette attente déçue : n’être ni trahi, ni surtout lâché. À défaut du vers si concentré et si plein, à défaut de « l’of meat » de Charles Baudelaire, il possède lui aussi des maniérismes exquis, des élans vers des joies minutieuses