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ALEXANDRE DE RIVIÈRE

trations scientifiques : veut-il rendre palpable l’idée de l’infini, il représente une chose qui se voit, qui s’entend en plusieurs lieux à la fois :

Vois-tu pas les rayons que le Soleil engendre
À Rennes qu’à Paris en même tems s’épandre ?
N’entens-tu pas le son qui parmy les airs gronde
De l’horloge Renoise une lieue à la ronde,
Quand elle sonne l’heure, et va de toutes parts
Nos oreilles touchant de ses sensibles dards ?…

Il n’est pas moins familier, dans son désir d’être clair, en montrant que la lumière est incorporelle, qu’elle est indépendante de l’air qui l’entoure :

Outre si un flambeau de nuict tu vois porter
Par un laquay courant, cette clarté sans cesse
D’un lieu se meut à l’autre, et passant de vitesse,
Illustre[1] icy, or’ la, les ombres de la nuict,
L’air toutefois ne bouge, elle au contraire fuit
Que si l’air le suppost etoit de la lumière,
Il s’en iroit avec, courant même carrière…
Tu vois aussi de nuict, régnant le Capricorne,
Vulcain[2] emprisonné dans le verre ou la corne,
Et au milieu pendu de la rue à Paris,
Comme en dépit d’Eole et de tous ses esprits,
Il jette une clarté qui les passans eclere,
De sa place immobile et tousiours tout entiére,
Ce qui pas n’adviendrait si corporelle étoit
Ains bientost transportée ou en pièces seroit…

  1. Illustrer, éclairer.
  2. Vulcain, veut dire ici feu ; c’est une figure bien hardie, que Rivière a employée ailleurs : « le paresseux » — dit-il — « a toutes les peines du monde à se lever, il ne se décide que s’il entend le larron escalader son mur,
    « Ou petter le Vulcain de son lit en la paille… »