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FRANÇOIS AUFFRAY

ont souvent fourni l’idée, Auffray les a enrichis de traits qui, sous la critique ingénieuse de l’ajustement et du maintien, visent et atteignent l’homme même. Pibrac, le maître du genre, n’a rien de supérieur à ces Conseils aux jeunes filles, vraiment dignes d’une anthologie :

Fille, je t’accompare à la candeur du lys,
Beau, bien fait, odorant ; telle aussi tu dois estre
Belle, cointe, jolie........
Ne frise, ne rostis, ne poudre tes cheveux,
Et ne porte dessus que bien peu de parure.
Il n’y a rien si beau que la mesme nature,
L’artifice auprès d’elle est un singe hideux.
Ne montre ton beau sein, vray throsne de pudeur ;
Comme les papillons se bruslent aux chandelles,
On bruslera, voyant ces raretez si belles ;
Mais s’il est laid, pourquoi monstres-tu ta laideur ?
Oste moy tous ces fards qui gastent ton beau teint,
Ce villain vermeillon, la pommade, céruse ;
Le talc, le blanc d’Espagne, ô filles, vous abuse.
Le beau teint est celuy qui n’est fardé, ni feint.
Use d’un doux parler au plus humble ou testu,
Et qu’on voye toujours la pudeur virginale
S’esgayer sur ton front, comme une rose palle,
Car elle est l’ornement des filles de vertu.
Marche modestement quand tu es en chemin,
Sans, trop libre, hausser soubs le masque ta veue ;
Ces regards egarez, afin d’estre cogneüe,
Tournent le plus souvent à tres mauvaise fin.
Ne danse point du tout, ou danse rarement,
Car ce folastre ébat rend mille âmes captives ;
Ces bonds et ces élans sont choses si lascives,
Qu’elles virent[1] d’un saut le plus fort jugement.

  1. Très rare activement, dans le sens de faire tourner.